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Introduction au plain-chant

 

Tel qu'il a été mentionné précédemment, la dimension linéaire évidente des oeuvres contrapuntiques relève non pas du contrepoint, mais du plain-chant. Il importe donc de se familiariser avec le chant grégorien, fondement de l’éducation musicale que recevaient tous les musiciens du Moyen-âge et de la Renaissance, sans exception. À ce propos, laissons la parole à un musicien de l'époque qui, au chapitre de son traité intitulé «Pourquoy il faut commencer par l'eschele pour venir a la Composition», écrit ceci :

 

«L'ordre et méthode du contrepoint requiert de commencer par l'eschele [générale des sons du plain-chant], car en tous les artz et sciences y a quelque petite chose qui nous fait cognoistre les grandes. […] Et pource que tout cela est contenu en l'eschele, faut donq commencer par icelle, afin de cognoistre tout le fondement de l'art, comme les intervalles, la nature du chant, les muances des voix, et tout ce qui apartient a l'art de chanter» (Yssandon 1582, 3r).

 

1. Modes ou tons ecclésiastiques

 

Le plain-chant de l’Église occidentale est, de nos jours, mieux connu sous le nom de chant grégorien. Exclusivement vocal et entièrement monodique, il est destiné à être chanté sans accompagnement et sans soutien harmonique de quelque sorte que ce soit. Il s'agit là d’une musique dans sa plus pure expression et puisque la modalité en est la caractéristique la plus homogène, nous nous attacherons d'abord à l'étude du système modal médiéval.

 

.I.

Selon leur note finale (finalis) et leur tessiture (ambitus), les mélodies grégoriennes sont classées dans l'un des huit modes (Oktōēchos) que les théoriciens carolingiens ont empruntés, vers la fin du VIIIe siècle, à la théorie byzantine. Deux de ces modes (ou tons) se terminent sur , deux sur mi, deux sur fa, deux sur sol ; et les quatre paires (maneriae) ainsi formées sont appelées respectivement protus, deuterus, tritus et tetrardus. Bien qu'ils se partagent une même finale, les deux modes d'une même paire se distinguent l'un de l'autre par leur tessiture authente (aigue) ou plagale (grave).

 

Les modes authentes (numéros impairs) couvrent un ambitus de 9e, de la seconde en-dessous de la finale jusqu'à l'octave au-dessus. Leurs compagnons plagaux (numéros pairs) en font de même, mais de la quarte en-dessous de la finale jusqu'à la sixte au-dessus.

 

Ex. 1.1 - Les 8 modes du plain-chant

§ Ici, la finale modale est indiquée par une note carrée blanche et la teneur (tenor), seconde en importance, par une note losangée blanche. Les liaisons montrent les espèces (species) de quartes et de quintes (voyez la page suivante). 

 

.II.

Ces huit modes sont parfois transposés à la quinte supérieure (sans altération à la clef) ou à la quarte supérieure (avec sib à la clef) ; les finales modales deviennent alors la, si, do, ou sol, la, sib, do.

 

Ex. 1.2 - Finales modales naturelles et transposées 

(D'après Yssandon 1582, 12v.)

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